Ukraine, quelque part dans le Donbass.
Un homme en treillis observe le terrain devant lui depuis son poste de combat.
Un autre homme portant le même treillis, au physique du type ayant un mammouth dans ses ancêtres, se glisse dans le poste.
— Salut le Français ! Toujours rien ?
— Non, c'est calme, sergent.
— Tant mieux, on va bientôt bouger et je n'ai pas envie de me faire tirer comme des lapins en sortant d'ici.
— Ouais, ça serait con.
— Comme de venir risquer son dumb ass dans le Donbass ?
— Ouais, quelque chose comme ça.
— Avoue qu'il faut être con pour quitter sa petite vie tranquille en France pour venir dans ce merdier.
J'ai pas eu le choix, mais toi tu l'avais. Pourquoi tu t'es engagé ? dit le sergent en s'allumant une cigarette, planqué derrière la butte de terre.
— J'avais besoin de changer d'air.
— Et te voilà servi. Mais t'avais besoin de venir risquer ta peau pour ça ? A ta place, je me serai pris un billet pour les Seychelles.
— Faut croire. Au moins ici je me sens utile.
— Mouais. Au moins tu sais tirer, tu as un minimum de sens tactique et tu sais cuisiner. On peut pas vous enlever ça à vous les français. T'as pas l'air d'un dealer ou d'un voyou. T'es pas le genre à te fourrer dans les ennuis. J'me trompe ?
— Non, je ne suis pas ici à cause de soucis avec la justice.
— J'm'en doutais. T'as pas l'air non plus d'être un de ces fanatiques politiques. T'en avais marre de ton boulot ? A moins que ce soit à cause d'une femme !
— Oui, c'est en partie à cause d'une femme.
— J'en étais sûr ! Vous les français vous êtes vraiment trop romantiques !
— Oh, il n'y a rien eu de romantique. Enfin, elle ne l'a pas voulu.
— Elle t'a mis un râteau ? T'es ici à cause d'un râteau ? dit le sergent en éclatant de rire.
— Moque-toi, au moins je suis ici pour défendre ton pays.
— C'est vrai. T'inquiète, on va te trouver une petite Ukrainienne. Une fille de la campagne bien robuste. Si possible avec des vaches.
— Des vaches ? Mais pourquoi ?
— Parce qu'à force de traire les vaches, les filles de ferme acquièrent une certaine dextérité.
Un mélange de douceur et de fermeté inégalable !
— Je crois que je vois.
— Je te présenterai bien ma sœur mais je ne suis pas sûr de vouloir voir ta tronche tous les ans à Noël.
Il faudra que tu améliores ton ukrainien.
— Mon ukrainien est meilleur que ton anglais !
— Ah ah, c'est vrai ça. Sacré Français. Va réveiller Bogdan et Viktor, on part dans trente minutes.
— Bien sergent.