Mercredi Fiction du 30 novembre 2022

Par Von △ <von@dice.camp> le 30 novembre 2022 à 10 h 14 UTC

#MicroFiction #MercrediFiction

- Sans un bruit -

Dans le dortoir silencieux de l'internat dédié aux enfants malentendants, Wes et June ne sont toujours pas couchés, préférant se raconter des blagues en langue des signes.
L'ambiance changea subitement lorsque June s'arrêta pour demander à Wes s'il a, lui aussi, entendu le bruit au fond du couloir.

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Par Sarah L <sllg@eldritch.cafe> le 30 novembre 2022 à 12 h 10 UTC

#mercrediFiction

La lumière filtrait difficilement à travers les vitres, comme si l’épaisseur de l’air reflétait la lourdeur de l’ambiance. Pourtant, à l’extérieur, le soleil d’un après-midi de mai faisait réfléchir ses rayons éblouissants sur toutes les surfaces.

La personne au costume renifla bruyamment, pleinement satisfaite de ce qui se présentait devant ses yeux. Le propriétaire des lieux, quant à lui, tortillait ses doigts d’un air nerveux. Au-dessus d’elleux, le bois grinça bruyamment. Depuis chaque recoin, des ombres semblaient se mouvoir aux extrémités de leurs champs de vision. Et par moments, une troisième respiration se mêlait aux leurs, sans que l’une ni l’autre ne puissent dire de quel endroit précis elle provenait.
Des doigts graciles furetèrent dans la veste du costume et la voix neutre trancha le silence.

- Ça vous vous dérange si je fume ?

L’attitude désinvolte de son interlocuteur·ice le désarçonna quelques instants avant qu’il ne puisse lui répondre avec empressement.

- Je vous en prie.

Cela faisait des mois qu’il tentait désespérément de vendre la maison, en vain. Il l’avait lui-même achetée encore quelques mois auparavant, saisissant ce qui semblait être une occasion en or avant de rapidement déchanter devant la réalité : cette baraque était tout bonnement inhabitable. Laisser fumer un·e invité·e aurait simplement été impensable il y a encore quelques semaines ; désormais il était prêt à se plier à n’importe quoi pour quitter au plus vite cet endroit maudit.
La personne au costume tapota sur sa cigarette pour en faire tomber les cendres et reprit :

- Combien en voulez-vous, déjà ?

- Cin… Cinquante mille euros.

- Pour la totalité des cent trente-sept mètres carrés ?

- Oui, oui.

- Vendu.

Le futur-ex propriétaire ressenti une vague de soulagement mêlée à une culpabilité pressante. Il hésita quelques secondes, en proie à un évident conflit interne. Finalement, son éthique l’emporta.

- Par contre, je me dois d’être parfaitement honnête avec vous…

- La maison est hantée ? Oui, je sais.

Comme pour valider ses propos, des pas empressés résonnèrent dans l’escalier, succédés d’un bruit de porte qui claque. La surprise de l’échange l’emporta face aux évènements douteux qui venaient de se produire. Devant la stupeur du propriétaire, la personne au costume expliqua :

- Voyez-vous, mon travail consiste à dénicher ce genre d’investissement et d’y exploiter l’énergie fantomatique. Une fois l’achat conclu, nous allons faire installer un peu partout un système de dynamo sur chaque porte, y compris les placards et les tiroirs, et relier le tout à un réseau d’énergie – je vous passe les détails techniques – dont pourra bénéficier tout le quartier à un tarif avantageux. Nous allons également embaucher des gens dont l’unique but sera d’habiter les lieux et de stimuler l’activité paranormale. Jusqu’à présent, notre concept cartonne à mort...

La personne au costume gloussa devant le visage décomposé de son interlocuteur avant de reprendre d’un air sérieux.

- Nous l’avons déjà mis en place dans d’autres villes et vraiment, je vous le dis, c’est l’avenir. Tenez, prenez notre brochure.

L’avenir est un monde où, jusque dans la mort, les tourmenté·e·s sont exploité·e·s.

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Idée originale et relecture par Alexandre L.
Rédaction par Sarah L.

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Par chibi-[N]ah 🇫🇷 :troll_verf: <alex@social.nah.re> le 30 novembre 2022 à 22 h 20 UTC

C’était un projet un peu débile qui me trottait en tête. Profiter d’un ballon radio-amateur pour envoyer un objet dans l’espace.

Ça aura pris énormément de temps, mais il a fallu batailler longuement, notamment pour avoir les autorisations requises (sécurité civile, association de radio-amateur, station de radiosondage, déclaration à l’aviation civile, préfecture, mairie…).

Ensuite, ce fut le problème des contraintes techniques. La masse totale, ballon, parachute et charge utile ne devant pas dépasser les 4 kg, il a fallu faire des concessions. On avait pu réduire à un total de 2,8 kg, transpondeurs et caméra sportive incluse, ce qui laissait 1,2 kg pour l’objet.

Après plusieurs expérimentations, on a fini par se rabattre sur le bois balsa, qui était suffisamment léger. Pour gagner encore plus, on a décidé de n’utiliser que de la colle, et aucun clou ni vis.

L’objet le plus gros et le plus absurde que l’on a pu fabriquer en tenant compte des contraintes, ce fut une chaise, à l’échelle 70 %.

La station de radiosondage a pu nous proposer plusieurs fenêtres de tir, à différentes dates. Contrairement à un ballon-sonde météo, qui est envoyé quotidiennement, on souhaitait de préférence un temps ensoleillé, pour avoir de bonnes images lors de l’ascension.

La troisième fenêtre fut la bonne. C’était un samedi matin de juin, le beau temps était prévu pour la journée, peu de vent en haute altitude.

Quatre radio-amateurs, une journaliste, deux gendarmes pour la sécurité de l’opération, cinq personnes de la station de radiosondage pour la supervision, quelques curieuses et curieux, situés derrière les barrières de sécurité, étaient présentes.

Une heure avant le lancement, les dernières vérifications furent faites. Matériel radio en fonctionnement, test de la caméra, batteries chargées, étanchéité du ballon et test du parachute.

Vingt minutes avant le lancement, le gonflage du ballon à l’hélium démarra.

L’heure du lancement arriva.

Le ballon-sonde décolla sans aucun souci, puis emporta le parachute, fermé, la nacelle avec le matériel radio, la chaise remplaçant alors le lest, et enfin le déflecteur radar. La hauteur totale avoisinait les 13 mètres. Une hauteur a priori classique d’après l’équipe de la station. Ou tout du moins, ce que j’ai pu comprendre.

Durant l’ascension, on put voir des images assez spectaculaires sur l’un des deux ordinateurs portables affichant les images envoyées par la caméra. L’autre ordinateur servant à surveiller la montée, la position du ballon étant suivie par un système de géolocalisation satellite.

Le ballon continuait de monter, et atteignit les 20 kilomètres d’altitude. Pas la limite admise par la littérature scientifique pour parler d’espace, qui est de 31 kilomètres. Il y restera pendant environ une heure, le temps de faire les communications longues distances prévues par les radio-amateurs.

Une fois terminé, la commande d’éclatement du ballon fut enclenchée, et sa descente fut suivie par plusieurs équipes réparties un peu partout dans la région. Le parachute s’était bien ouvert, on l’avait constaté en voyant la vitesse de chute de l’ensemble.

Le ballon, la nacelle et la chaise (partiellement cassée, lors de l’impact au sol) furent retrouvés dans la soirée, à environ 70 kilomètres de la station. Tout fut récupéré sans aucun problème, au milieu d’un pré.

Un gros soulagement, après tant d’efforts, et le stress pendant toute la matinée.

Le lendemain, on s’est de nouveau retrouvé, pour extraire la vidéo de la caméra, visionner et extraire les meilleurs passages.

L’une des séquences les plus impressionnantes, ce fut celle où on voit la chaise flotter dans l’espace.

Une Chaise Dans L’Espace

#UCDLE #MercrediFiction

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