C’était un projet un peu débile qui me trottait en tête. Profiter d’un ballon radio-amateur pour envoyer un objet dans l’espace.
Ça aura pris énormément de temps, mais il a fallu batailler longuement, notamment pour avoir les autorisations requises (sécurité civile, association de radio-amateur, station de radiosondage, déclaration à l’aviation civile, préfecture, mairie…).
Ensuite, ce fut le problème des contraintes techniques. La masse totale, ballon, parachute et charge utile ne devant pas dépasser les 4 kg, il a fallu faire des concessions. On avait pu réduire à un total de 2,8 kg, transpondeurs et caméra sportive incluse, ce qui laissait 1,2 kg pour l’objet.
Après plusieurs expérimentations, on a fini par se rabattre sur le bois balsa, qui était suffisamment léger. Pour gagner encore plus, on a décidé de n’utiliser que de la colle, et aucun clou ni vis.
L’objet le plus gros et le plus absurde que l’on a pu fabriquer en tenant compte des contraintes, ce fut une chaise, à l’échelle 70 %.
La station de radiosondage a pu nous proposer plusieurs fenêtres de tir, à différentes dates. Contrairement à un ballon-sonde météo, qui est envoyé quotidiennement, on souhaitait de préférence un temps ensoleillé, pour avoir de bonnes images lors de l’ascension.
La troisième fenêtre fut la bonne. C’était un samedi matin de juin, le beau temps était prévu pour la journée, peu de vent en haute altitude.
Quatre radio-amateurs, une journaliste, deux gendarmes pour la sécurité de l’opération, cinq personnes de la station de radiosondage pour la supervision, quelques curieuses et curieux, situés derrière les barrières de sécurité, étaient présentes.
Une heure avant le lancement, les dernières vérifications furent faites. Matériel radio en fonctionnement, test de la caméra, batteries chargées, étanchéité du ballon et test du parachute.
Vingt minutes avant le lancement, le gonflage du ballon à l’hélium démarra.
L’heure du lancement arriva.
Le ballon-sonde décolla sans aucun souci, puis emporta le parachute, fermé, la nacelle avec le matériel radio, la chaise remplaçant alors le lest, et enfin le déflecteur radar. La hauteur totale avoisinait les 13 mètres. Une hauteur a priori classique d’après l’équipe de la station. Ou tout du moins, ce que j’ai pu comprendre.
Durant l’ascension, on put voir des images assez spectaculaires sur l’un des deux ordinateurs portables affichant les images envoyées par la caméra. L’autre ordinateur servant à surveiller la montée, la position du ballon étant suivie par un système de géolocalisation satellite.
Le ballon continuait de monter, et atteignit les 20 kilomètres d’altitude. Pas la limite admise par la littérature scientifique pour parler d’espace, qui est de 31 kilomètres. Il y restera pendant environ une heure, le temps de faire les communications longues distances prévues par les radio-amateurs.
Une fois terminé, la commande d’éclatement du ballon fut enclenchée, et sa descente fut suivie par plusieurs équipes réparties un peu partout dans la région. Le parachute s’était bien ouvert, on l’avait constaté en voyant la vitesse de chute de l’ensemble.
Le ballon, la nacelle et la chaise (partiellement cassée, lors de l’impact au sol) furent retrouvés dans la soirée, à environ 70 kilomètres de la station. Tout fut récupéré sans aucun problème, au milieu d’un pré.
Un gros soulagement, après tant d’efforts, et le stress pendant toute la matinée.
Le lendemain, on s’est de nouveau retrouvé, pour extraire la vidéo de la caméra, visionner et extraire les meilleurs passages.
L’une des séquences les plus impressionnantes, ce fut celle où on voit la chaise flotter dans l’espace.
Une Chaise Dans L’Espace
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